Les parents

Les parents

J'ai commencé par l'aspect citoyenneté pour deux raisons précises ; tout d'abord, parce que la règle fondamentale en ésotérisme est de raisonner de l'universel au particulier et, deuxièmement, parce que le thème du citoyen, de la relation de l'unité avec le tout, de l'individu avec l'état, est aujourd'hui une question qui retient l'attention générale dans les affaires du monde. Les journaux, la radio et les gouvernements en traitent. Ce sujet comprend forcément tout le problème de la liberté individuelle et de la responsabilité collective. Cette relation subtile doit être comprise et exprimée par l'humanité en conformité avec les principes sous-jacents de la structure humaine et planétaire tout entière. Cette structure est celle d'une hiérarchie universelle. En dépit des raisonnements du mental humain, cette hiérarchie existe et s'étend de l'atome de substance qui touche le fond même de la manifestation, jusqu'au système solaire tout entier. Elle exprime chaque type de conscience dans son ascension graduelle, depuis celle de l'infiniment petit jusqu'à celle de l'infiniment grand. C'est d'une petite section de la structure hiérarchique – d'une très petite section – que nous nous occupons. Notre champ d'investigation est celui de la quatrième Hiérarchie Créatrice qui est la hiérarchie des êtres humains ; il concerne les membres de cette hiérarchie, à l'intérieur de sa périphérie hiérarchique ; il porte aussi sur une zone possible d'existence dans les règnes subhumains, à un échelon inférieur de l'échelle d'existence hiérarchique, et sur cette structure hiérarchique immédiatement supérieure à celle des humains dans l'échelle de l'existence, celle du règne spirituel, le cinquième, le royaume de Dieu.

L'homme est nettement relié à la grande unité hiérarchique que nous appelons règne animal, par l'intermédiaire de ses corps, animal, éthérique et astral. Il est aussi relié au royaume des âmes, car sa propre âme fait partie intégrante de ce royaume, exactement comme son corps physique fait partie intégrante du règne animal. L'aspect de lui-même qui est strictement et spécifiquement humain est le corps mental ; c'est essentiellement l'organe de relation avec toutes les autres races humaines.

En ce qui concerne notre sujet, donc, je souhaite que vous gardiez à la pensée le fait que les "fils de conscience lumineuse" que nous créons immanquablement, et qui, en fin de compte, forment l'antahkarana, doivent être tissés entre chacune et entre toutes les unités hiérarchiques. Dans le règne humain lui-même, ces liaisons et ces facteurs de jonction doivent être établis d'unité à unité, et de groupe à groupe.

Dans les premiers stades, cela s'effectue sur une échelle de masse sous l'influence de la culture et de la civilisation dominantes. Par leur impact extérieur et par le moyen de leur influence télépathique, elles produisent un changement lent et progressif, car au début de la période de l'évolution le développement est si lent qu'il en est à peine perceptible.

Inévitablement, cependant, des changements subjectifs apparaissent dans la vie de l'individu. A mesure que l'évolution se poursuit, le processus devient de plus en plus rapide, de sorte qu'aujourd'hui, dans les pays dits civilisés, les zones affectées par la civilisation s'agrandissent très vite et les effets culturels sont profonds et accélérés.

Il est difficile, pour le penseur moderne, de concevoir le temps où il n'y avait pas de conscience raciale, nationale, ou religieuse fusionnée, telle qu'elle s'exprime dans le monde d'aujourd'hui. Même l'homme le plus imaginatif est incapable de se représenter un état d'esprit où la conscience était purement instinctive, occupée du soi au sens physique, et incapable d'enregistrer des contacts plus larges que ceux de l'accouplement, ceux de la progéniture et l'exigence des appétits physiques. On a tenté l'étude d'un tel état de conscience en relation avec l'évolution des tribus en voie de disparition rapide dans le monde moderne, mais même là, il a été impossible de tenir compte correctement des impressions et influences subtiles qui résultent de la pensée, et de la pression mentale intérieure de la partie civilisée de l'humanité.

Progressivement, le monde des hommes est devenu de plus en plus conscient de soi, et se différencie nettement de l'animal, tout en reconnaissant la relation.

L'état de conscience, relié au royaume des âmes, est divisé en différentes écoles psychologiques, où il est appelé occulte ou mystique.

Nous pourrions donc, en ce qui concerne la conscience de l'humanité, diviser la question tout entière en trois parties :

1. Celle qui concerne l'appareil tangible, le corps animal, et le mécanisme de réceptivité grâce auquel les contacts objectifs et extérieurs sont rendus possibles.

2. Celle qui concerne la vie intérieure ou psychologique de l'homme. Cette vie intérieure consiste principalement en désir, aspiration, ambition et activité mentale, tout ceci pouvant se manifester aussi bien dans la forme animale que dans la forme psychique, mentale ou spirituelle.

3. Celle qui concerne la vie spirituelle de l'homme et sa relation avec le monde des âmes, ce qui implique, soit dit en passant, sa relation avec sa propre âme.

A mesure que le temps s'écoulait, ces trois aspects en développement, dans le domaine de la conscience, ont amené l'humanité à reconnaître non seulement les relations personnelles intérieures de l'homme (le conduisant à comprendre ses moyens physiques, psychologiques et mentaux) mais ils ont aussi amené l'humanité à prendre conscience des diverses relations humaines de groupe dont la première et la plus importante jusqu'ici a été l'unité de groupe familiale.

C'est là que s'est développée l'une des distinctions majeures entre l'état de conscience humain et celui de l'animal, par l'imposition de la Loi de Nécessité.

Cette loi a offert l'occasion de développer le sens de la responsabilité pour la famille. Dès qu'un animal ou un oiseau peut pourvoir à ses besoins physiques, il est rejeté par ses parents et laissé à ses propres ressources. Dans le cas de la famille humaine, les soins physiques de l'enfant, de même que son développement psychologique, ont été progressivement étendus de sorte que soit les parents, soit l'église, soit la communauté, soit l'état, en sont responsables pendant de nombreuses années – l'élément temps variant selon le pays de naissance et la position sociale.

Ceci a entièrement modifié l'aspect des choses ; en conséquence, le premier groupe dont l'enfant prend normalement conscience est le groupe familial, en tant qu'unité dans la communauté. Dans cette relation de groupe particulière, à travers les âges (à la fois symboliquement et en fait), les facteurs suivants, sous-jacents à la structure même de l'existence, sont sauvegardés et développés ; ils sont proposés à la race comme étant l'idéal ultime.

1. La reconnaissance du statut hiérarchique qui, en dernière analyse, est la relation du moins grand au plus grand, du plus faible au plus fort, et du moins expérimenté au plus expérimenté. Le sens de la protection se développe ainsi ; c'est la mise en oeuvre, dans l'univers, d'une forme de l'aspect amour.

2. La reconnaissance de la responsabilité, héritée, appliquée et endossée. C'est la relation du plus vieux au plus jeune, du sage à l'ignorant. De cette façon, s'affirme la nécessité d'offrir l'occasion de développer la connaissance.

3. La reconnaissance de la faculté de don de soi, qui est, ou plutôt devrait être l'expression de la relation d'unité à unité dans le grand groupe, ou de groupe à groupe dans le tout encore plus grand. Le don de soi est essentiellement le processus selon lequel chacun donne à chacun dans le domaine psychique ; c'est l'une des expressions rudimentaires de la qualité de sacrifice de soi qui à son tour est un aspect de la volonté divine. Du fait qu'il est relié à la vie de volonté ou monadique, il est encore complètement incompris et mal interprété.

C'est en réalité le sens de la synthèse ou de l'identification, de "chacun pour tous et tous pour chacun". Ce sens se développe aujourd'hui comme jamais auparavant, mais il est encore tellement embryonnaire que les mots n'aident pas à l'expliquer. Cette faculté de don de soi n'est pas une forme d'oubli magnanime, non plus qu'un geste de supériorité par lequel on efface l'ardoise. C'est le souffle même de la vie, le fait que tous donnent tout pour tous.

4. La reconnaissance de la relation réciproque de groupe, s'exerçant avec justice, harmonie et rythme, au sein de la relation mondiale plus vaste. C'est le sens des justes relations, poursuivies consciemment, et développées harmonieusement.

Dans la période qui vient, et sous l'influence de la nouvelle éducation, ces quatre reconnaissances de base seront inculquées et enseignées à l'école à tous les enfants. Ainsi, ils gouverneront et développeront la nouvelle forme d'unité familiale qui va inévitablement apparaître.

La famille (comme toute affaire humaine) a partagé la séparativité générale, l'égoïsme, l'exclusivisme isolé et individuel, basés sur la distinction de classe, la tradition, les attitudes raciales et les coutumes nationales. Les familles (de n'importe quelle catégorie ou niveau) présentent au monde un front uni ; les parents défendent leurs enfants, leur position, leur situation, qu'ils soient dans leur droit ou non ; ou met trop l'accent sur l'orgueil familial, la tradition, la lignée, ce qui conduit aux différentes barrières séparant aujourd'hui l'homme de l'homme, la famille de la famille, et le groupe du groupe. L'emprise du passé sur les familles est le facteur responsable de la révolte de la jeunesse moderne contre l'autorité parentale, bien que d'autres facteurs – tels la rébellion contre la religion imposée, les valeurs et philosophies dépassées – soient également responsables. Cependant, dans le prochain ordre mondial, les éducateurs prépareront les jeunes à participer activement et consciemment à la vie de groupe. Ils y seront préparés par l'entraînement à la reconnaissance des quatre facteurs que j'ai indiqués comme essentiels au progrès humain actuellement. Lorsqu'ils seront saisis et pratiqués, ils engendreront les justes relations nécessaires et finalement un monde harmonieux.

Hiérarchie, responsabilité, influence réciproque de groupe, don de soi ou sacrifice, voilà les quatre catégories de prises de conscience qui permettront à chacun de jouer son rôle, et de participer à jeter un pont de personne à personne, de groupe à groupe, de nation à nation, établissant ainsi le nouveau monde de relations de corps reconnues ; cela produira, en fin de compte, la civilisation de lumière et d'amour qui caractérisera l'âge du Verseau.

Ce sont ces quatre concepts qui sous-tendent la Science de l'Antahkarana, la Science de la Méditation, et la Science du Service. On ne doit pas interpréter leurs connotations dans un sens sentimental, ou selon les idées courantes, mais toujours sous l'angle de l'intelligence exercée et de la conscience développée spirituellement.

Le fait d'être père ou mère ne sera pas considéré principalement comme une fonction animale, ou comme une fonction purement économique et sociale, ce qui est la manière habituelle d'aborder la question actuellement.

L'établissement d'un fil de lumière, délibérément préparé ou construit (en tant que partie bien précise de l'antahkarana mondial) entre parents et enfant, même au stade prénatal, sera soigneusement enseigné. Ainsi, un rapport étroit sera engendré "dans la lumière" sans établir, néanmoins, une autorité ou domination mentale indue. Cette dernière phrase vous montrera à quel point il a été jusqu'ici impossible d'accélérer l'enseignement de la science de l'antahkarana.

Aujourd'hui, il est possible de commencer à poser les bases de ce nouvel enseignement, car la jeunesse de tous les pays impose à ses parents et à ses enseignants l'idée de son indépendance essentielle et déterminée. La révolte des jeunes, en dépit de tous les désastres individuels et immédiats, a été une chose désirable ; elle a préparé la voie à des relations justes et meilleures, reposant sur les prémisses que j'ai formulées.

Il est évidemment impossible que je fasse plus qu'indiquer les bases de la nouvelle éducation qui préparera la jeunesse aux responsabilités et aux devoirs des parents. Tout ce problème est lié à celui du sexe, ainsi qu'au problème de l'Etat et de son autorité, bien plus qu'on ne l'admet généralement. Ce sont deux problèmes qui ne font qu'émerger aujourd'hui dans leur pleine signification, et je ne peux pas les traiter ici. L'état de père et de mère est le résultat, et le résultat prévu, de la relation de deux corps animaux ; je souhaiterais que vous réfléchissiez – même de manière inefficace – aux implications de cette déclaration, sur le groupe plus vaste. Cela rend possible l'Etat, la nation et le groupe, en ce qui concerne la manifestation ; ici encore l'immensité du problème est écrasante. Il y a aussi une relation étroite et symbolique avec la Hiérarchie, car l'unité familiale est le symbole, sur terre, de la Hiérarchie. C'est par la relation sexuelle et la naissance physique que la grande Hiérarchie des âmes peut réussir à se manifester physiquement, et atteindre la perfection spirituelle dans les trois mondes de l'évolution humaine. On pourrait (et il faut garder soigneusement ce fait à l'esprit) diviser la Hiérarchie en deux groupes fondamentaux :

1. Les âmes qui ont atteint la perfection et qui sont parvenues à l'état de serviteurs divins.

2. Les âmes qui sont en cours d'évolution et qui passent par des périodes de réincarnation continuelle.

L'idée de la génération, de la naissance et de la manifestation subséquente, est comme un fil guidant toute la pensée ésotérique. Les anciens instructeurs de l'humanité, envoyés par la Hiérarchie de temps en temps, ont toujours employé le symbole du processus naturel pour illustrer et rendre clair l'enseignement nécessaire, et pour poser la base spirituelle de la vérité qui, dans l'âge prochain, conduira l'homme sur de nouvelles voies et vers de nouvelles manières de penser. Pour l'ésotériste, le processus de la naissance dans l'obscurité de l'incarnation physique est le processus prédestiné et préparatoire qui conduit à la naissance dans la lumière, qui se poursuit dans la lumière, et produit l'extériorisation du corps de lumière. Ce processus permanent (car cette naissance dans la lumière a toujours existé) engendrera le futur monde de lumière que les processus naturels de l'évolution ont pour dessein de révéler.

C'est la "seconde naissance"dont parle le Nouveau Testament par laquelle l'homme "naît à nouveau" dans le monde de lumière et d'amour.

Sous l'angle de l'éducation nouvelle, ces concepts nouveaux gouverneront l'attitude mentale des parents dans la prochaine civilisation, et c'est à cela qu'il faut préparer l'adolescent. C'est la fausse interprétation des plus récents concepts qui domine actuellement ; c'est ce qui cause l'insistance mise – dans certains pays et parmi les nationalistes de tous pays – sur la nécessité d'augmenter le taux de natalité. On se préoccupe actuellement du taux de natalité, de sa montée. de sa chute, du soin correct des mères et des enfants, même dans la période prénatale, et de l'éducation des parents. De tout cela, il sortira finalement de nouvelles idées et de nouvelles attitudes qui seront dans la ligne de la culture et des concepts du monde nouveau. Mais aujourd'hui, le motif de cette sollicitude est mauvais. L'impulsion intérieure à traiter de tout le problème des parents d'une manière neuve et meilleure est juste. Les objectifs, néanmoins, que l'on propose à la race ne sont pas les plus élevés, ou les plus désirables. La nécessité des temps engendrera un jour des changements radicaux dans la manière d'aborder la vie de famille, le rôle des parents et l'instruction des enfants ; à cette fin, un noyau d'individus prépare la voie, ou peut la préparer s'il travaille avec fidélité, attention et intelligence.