LE TIBETAIN

LES ENSEIGNEMENTS DU TIBETAIN

3. Révéler

3. Révéler

L'objectif de l'évolution humaine dans notre cycle planétaire est la vue, dont le point culminant est la perception spirituelle qui est le don majeur de l'âme à la personnalité, quand le contact est réalisé ; elle communique le sens de l'amour attractif, indique la nature des choses, révèle le monde de l'âme et confère le grand don de lumière, de connaissance et d'illumination ultime. Tels sont les buts du mystique, de l'aspirant et du disciple consacré. Le plus grand don physique est celui de la vue, et il en est de même sur une courbe plus élevée de la spirale dans le monde de l'âme. Quand le disciple est parvenu à  une certaine mesure de vision et que son but est "en vue", il peut alors être admis dans un ashram où la nature de la révélation peut être portée à sa connaissance.

Les hommes peuvent confondre vision et révélation ; je m'efforce d'éclairer quelque peu votre mental sous ce rapport ; donc la phrase précédente est d'importance majeure. Les aspirants ont tendance à penser que le but vers lequel ils s'avancent est celui du contact avec l'âme, le but secondaire étant celui de position hiérarchique et le troisième, celui de service. Ceci néanmoins n'est pas exact.

Le but s'offrant à l'aspirant est la conscience de la non-séparativité et la reconnaissance d'une inclusivité universelle ; le but secondaire est l'aptitude à révéler la nature de la réalité, l'Unité ; le troisième but est l'aptitude à prendre, dans les trois mondes, les mesures qui faciliteront la compréhension de ces données fondamentales pour l'humanité. Vous noterez comment cette dernière définition écarte inévitablement le facteur d'intérêt pour soi-même, dans sa totalité. On pourrait donc dire que la révélation concerne l'unité et rien d'autre. La nature pratique de cette vérité n'est reconnue que quand le disciple tente deux choses : la comprendre individuellement et faire pénétrer, dans le mental et la vie des hommes en tous lieux, la nature de l'unité planétaire et de la non-séparativité.

Le travail de l'aspirant est de  voir la lumière ; c'est seulement quand cela est devenu un fait dans sa conscience qu'il peut commencer à saisir la révélation cachée que peut mettre à jour cette lumière avec laquelle il est entré en contact et qu'il a utilisée. Voilà une autre phrase-clé proposée à vos réflexions.

Je ne cherche pas ici à traiter de la lumière, de la vision ou de l'illumination.  J'ai longuement traité de ces questions dans mes livres et elles ont constitué la recherche assidue des mystiques de tous les temps ; les Ecritures Sacrées et la littérature de toutes les nations donnent aussi beaucoup de renseignements à ce sujet. Je me préoccupe de la question de la révélation et de la tâche de l'initié consistant à révéler. Le disciple qui représente l'ashram doit révéler à l'humanité l'unité essentielle, sous-jacente à toute création. Il le fait tout d'abord en jouant le rôle de feuille de verre limpide, à travers laquelle tous peuvent voir la réalité de l'Unité, telle qu'elle se manifeste dans son fonctionnement pratique.

Lorsque, par ses paroles et sa propre vie, il a montré sa participation consciente à cette unité de base, il passe à la pratique des méthodes ashramiques qui rendent cette vérité fondamentale encore plus apparente. Vous pouvez voir ici pourquoi – en tant que technique hiérarchique – nous avons attiré l'attention du grand public sur le fait de l'existence du nouveau groupe des serviteurs du monde. Il offre une expression pratique d'une unité basée sur l'unité de motif, de reconnaissance, d'orientation (vers le monde spirituel et vers le service de l'humanité), de méthode et d'idées. Tout ceci en dépit du fait que la relation sur le plan physique n'existe généralement pas, et qu'il n'y a pas d'organisation ou de reconnaissance extérieure.

L'unité est subjective et, pour cette raison, elle est à l'abri de toute atteinte de la séparativité.

L'organisation intérieure à laquelle nous avons donné le nom de nouveau groupe des serviteurs du monde, afin de la reconnaître et de l'identifier, ne peut pas être brisée ou diminuée en aucune manière, car elle est construite autour d'un principe majeur de croissance évolutive qui – lorsqu'il est atteint – indique la perception de l'unité de conscience ; c'est une chose qui, lorsqu'elle est enregistrée et connue, ne peut pas être perdue ou réfutée. Une fois qu'elle est vue et comprise, elle devient un fait dans la conscience de celui qui la possède, tout autant que la reconnaissance et l'utilisation de son corps physique. Il sait que c'est un organisme complexe constituant une unité active par le moyen du principe de vie ; c'est un fait indiscutable dans la réalisation de l'homme intelligent.

Donc, quand le disciple est parvenu à voir et que la lumière afflue, la révélation de l'unité de toute vie est aussi simple qu'un événement courant ; elle survient tout d'abord pour lui en un éclair de compréhension, instinctive, instructive et merveilleuse, puis elle se stabilise, à mesure qu'il progresse, en une appréciation et appréhension permanentes ; finalement elle fournit le motif dynamique de toute action.

Quelle est la révélation immédiate que les initiés et les disciples du monde s'efforcent d'apporter à l'humanité ? Quel aspect de cette unité essentielle s'efforcent-ils de rendre simple et apparente ? L'une des choses les plus faciles à dire (comme l'a fait, par exemple, Krishnamurti) est que la vie est une ; qu'il n'existe rien d'autre que l'unité. Ceci est une formulation rebattue d'une très ancienne vérité, qui est aujourd'hui une platitude occulte. Mais la vie n'est pas encore "une" dans la conscience, si vrai que cela puisse être en fait. La raison en est que  la vie est la synthèse aimante en action, et cela n'est guère manifesté aujourd'hui. Nous avons la vie en activité, mais l'amour, basé sur l'unité comprise conduisant à l'expression de la synthèse, est encore absent. Néanmoins, cette vision surgit à l'horizon pour beaucoup de gens, car à l'heure actuelle nombreux sont ceux qui acquièrent la faculté de voir et chez qui la lumière afflue. La révélation viendra quand les disciples et les initiés auront perfectionné l'art de la révélation. La tâche de l'avenir est simple. Aujourd'hui, l'aspect important de l'unité fondamentale unissant toutes les formes, et sur lequel les travailleurs doivent mettre l'accent immédiatement, est  le fait du royaume de Dieu, de la Hiérarchie planétaire.

Les citoyens de ce royaume et les membres de cette Hiérarchie sont issus de tous les pays, de tous les partis politiques, de tous les groupes sociaux, de tous les cultes ou sectes religieuses, de toutes les organisations – quels que soient leurs objectifs exprimés – et l'universalité des domaines d'où ils émergent prouve leur unité sousjacente.

Quand cette unité prendra des proportions adéquates aux yeux de l'humanité, une véritable synthèse s'ensuivra. Il est donc demandé aux travailleurs hiérarchiques du temps présent de révéler avec plus d'insistance  le fait de la Hiérarchie. Si cela est accompli sur une grande échelle et au moyen d'une organisation appropriée, l'actuelle structure mondiale dans les domaines de la religion de l'économie et de la politique sera détruite en grande partie – cette destruction est déjà en cours. Une pression accrue de tous ceux qui reconnaissent le caractère effectif du royaume intérieur et subjectif de Dieu, engendrera des résultats étonnants. Ce royaume, par son pouvoir majeur (la qualité de synthèse, si vous pouviez le comprendre), rassemble en lui-même des hommes et des femmes de toutes nations, venus de tous les coins de la terre. Il les absorbe, non parce qu'ils sont orthodoxes ou religieux dans l'acception habituelle de ce terme, mais à cause de leur qualité propre. A mesure que leur nombre s'accroît, un mouvement inverse se produit simultanément. Des hommes se déplacent sur le plan physique, et le font en groupe afin de prouver la nature effective de l'unité mondiale qu'ils ont réussi à pénétrer. En conséquence, ils manifestent l'unité et la synthèse d'une manière si simple que les hommes en tous lieux pourront la saisir.

Le nouveau groupe des serviteurs du monde est l'avant-garde du royaume de Dieu, et la preuve vivante de l'existence du monde de l'Unité spirituelle.

Il est demandé à tous les postulants de  voir le Christ tel qu'Il est, afin que (comme le dit le  Nouveau Testament) "Tel Il est, tels nous devrions être dans le monde." Il est fait appel à tous les disciples et initiés pour qu'ils révèlent au monde la formation de groupe de tous les travailleurs spirituels, la nature de la conscience christique qui ne connaît nulle séparation, qui reconnaît partout les hommes comme des Fils de Dieu en voie de s'exprimer. Tout cela est désiré à cause de la nécessité d'insister sur la totale inclusivité de l'approche divine, vis-à-vis de l'humanité. Ces disciples et ces initiés actifs considèrent que tous sont "un" en essence, qu'ils sont des frères, ce qui répudie toutes les théologies conçues par l'homme (religieuses, scientifiques, politiques et économiques) et dit aux hommes en tous lieux : "Nous sommes tous des enfants de Dieu ; nous sommes tous également divins ; nous sommes tous sur la voie de la révélation de la divinité, et ceci sur le plan physique de l'existence ; c'est ce que nous révélons qui a de l'importance ; ce qui nous est révélé est de moindre importance, bien que cela ait dûment sa place dans le processus d'entraînement et de perfectionnement."

Il existe un ancien catéchisme qui s'efforce de clarifier, pour le néophyte sur le point d'être accepté, la distinction entre vision et révélation. Il n'est plus guère employé car le postulant part aujourd'hui d'une courbe beaucoup plus élevée de la spirale, qu'aux temps ou cette forme d'interrogation fut composée. J'aimerais néanmoins citer une ou deux des questions et réponses en vue d'instruire les aspirants d'aujourd'hui.

CATECHISME.

Que vois-tu, O disciple sur le Sentier ?

Rien que moi-même, O Maître de ma vie.

Regarde-toi de plus près et réponds de nouveau. Que vois-tu ?

Un point de lumière qui grandit et diminue, et rend l'obscurité plus noire.

Regarde l'obscurité avec un désir intense et, quand la lumière brillera, saisis l'occasion. Qu'est-ce qui apparaît maintenant ?

Un spectacle horrible, O maître de ma vie. Je ne l'aime pas. Ce n'est pas vrai. Je ne suis pas ceci ou cela. Cette chose mauvaise et égoïste n'est pas moi. Je ne suis pas cela.

Fais toute la lumière avec volonté, puissance et désir intense, puis raconte la vision qui peut se présenter. Que vois-tu ?

Révélée par la lumière, au-delà de l'obscurité, je vois une forme radieuse qui me fait signe. Quel est cet être qui, l'air bienveillant, se tient dans l'obscurité et dans la lumière ? Est-il, pourrait-il être moi-même ?

Qu'est-ce qui se fait jour à tes yeux alors que tu es sur la Voie, O disciple épuisé et las, cependant triomphant dans la lumière ?

Une forme radieuse qui est mon Soi, mon âme. Une forme sombre, cependant vieille et sage, expérimentée et triste. C'est mon soi, mon soi inférieur, mon image ancienne et éprouvée sur les chemins de la terre. Elles sont face à face et, entre les deux, s'étend le terrain ardent... Elles bougent et se confondent... Le Sentier arrive à sa fin. La Voie s'étend vers l'avant. Il est possible de voir, et dans la lumière la réalité apparaît.

Que peux-tu révéler maintenant, O Serviteur sur la Voie ?

La révélation vient à travers moi, O Seigneur de la vie. Je ne la vois pas.

Pourquoi ne la vois-tu pas ? Quelle entrave t'empêche de la saisir ?

Rien ne m'entrave. Je ne cherche pas la vision, car j'ai vu.

Ma tâche est la révélation. Je ne cherche rien pour moi même.

Qu'est-ce qui s'offre à toi pour être révélé ? Qu'as-tu à révéler ?

Seulement ce qui depuis longtemps, depuis une éternité, a toujours existé et a toujours été là. L'Unité de la Présence ; la zone d'amour ; l'Un inclusif vivant, aimant, enveloppant tout, étant tout, ne laissant rien à l'extérieur.

A qui cette révélation doit-elle être faite, O Serviteur du monde des choses vivantes ?

A tous ceux qui sont enveloppés dans la Présence aimante, vivante, à ceux qui, ne le sachant pas, maintiennent cette Présence et dureront éternellement – comme la Présence.

Et qui sont ceux qui vivent dans cette Présence et ne le savent pas ?

Ce sont toi et moi, et encore moi-même et tous ceux que je rencontre. C'est celui qui est dans chaque forme, et qui peut-être pense que la forme est tout ; qui vivant ainsi dans le temps et dans l'espace ne voit pas, dans la forme, la vie et la lumière se cachant à l'intérieur, derrière les voiles, entre le quatre et le cinq (le quatrième règne de la nature et le royaume de Dieu. A.A.B.), et ne voit rien d'autre. A ceux-là, je dois révéler la vérité.

Comment feras-tu ce travail, le plus difficile de tous, O disciple triomphant ?

En faisant voir que moi-même je suis la vérité ; en vivant comme un fragment de cette Présence, et en voyant toutes ses parties. C'est ainsi que la révélation est apportée dans le quatrième par le cinquième.

C'est tout ce que je peux vous communiquer actuellement sur l'injonction et le mot : Révéler, destiné à l'initié. Je désire signaler que sa tâche n'est pas de révéler le monde des symboles. Les cinq sens et le principe du mental suffisent pour y parvenir. Sa tâche n'est pas de révéler le monde de l'âme. Le disciple y parvient et interprète ce monde à mesure que se développe sa conscience de l'âme. Sa tâche est de révéler le monde des significations, le monde de la réalité, le monde de la vérité essentielle. Grâce à la réussite du processus de l'évolution, cette dernière tâche prend de l'extension et il faudra de plus en plus de révélateurs dans l'avenir immédiat. N'oubliez pas que l'appel invocatoire de la masse des hommes et l'énonciation intelligente de ce qui est demandé, par ceux qui sont préparés intelligemment à aller de l'avant, susciteront inévitablement la nécessaire réponse et les nécessaires révélateurs de la réalité.

Le mot suivant que nous allons examiner est, pour moi, l'un des plus difficiles à expliquer. La raison de cette difficulté est que vous êtes tous pénétrés des idées ordinaires concernant ces mots familiers, et qu'il est donc à peu près impossible pour moi de vous communiquer leur signification sous l'angle de la conscience de  l'initié. Identifiés avec l'aspect forme et avec la vie dans les trois mondes, vous avezde la difficulté à comprendre l'état d'esprit et le genre de perception qui distinguent ceux qui sont libérés des forces contraignantes des trois mondes conditionnant les êtres humains, entraînant de ce fait une orientation erronée et faisant obstacle à ce qui est appelé la perception spirituelle. L'attitude de l'homme ordinaire, et même du disciple ordinaire, est celle de quelqu'un qui regarde de la périphérie vers le centre, de quelqu'un qui est préoccupé de la forme de la vie et n'est pas conscient de la réalité comme l'est un membre de la Hiérarchie.

En conséquence, quand je vous dis que les mots, destinés aux initiés, constituant ce que j'ai appelé la Règle XIV ont une connotation très différente de celle à laquelle vous êtes habitués, je vous pose un problème très ardu. La vraie compréhension est, je m'en rends compte, impossible pour vous, mais vous pouvez bénéficier largement d'un  effort pour comprendre. Ce que vous entendez lorsque vous parlez du mental abstrait ne correspond pas véritablement aux faits ; l'effort pour penser de manière abstraite est réellement un effort pour penser comme un initié qui a transcendé le mental concret et pense, ou plutôt perçoit en termes de vie et non de forme, en termes d'existence et non de ce qui ancre l'existence sur le plan physique, ou même en termes de conscience telle que vous la comprenez. N'oubliez pas que je vous ai dit ailleurs que la conscience (telle que la saisissent la personnalité et l'âme) a peu de rapport avec la forme de perception vivante caractérisant l'initié, qui est essentiellement une expression de la Monade par l'intermédiaire des trois aspects de la Triade spirituelle. Ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne les deux mots qu'il nous reste à examiner : Détruire et Ressusciter.