LIVRE III - 39. La vie montante (l'udana) étant subjuguée, il y a libération à l'égard de l'eau, du sentier épineux et du bourbier ; le pouvoir d'ascension est ainsi acquis.

39. La vie montante (l'udana) étant subjuguée, il y a libération à l'égard de l'eau, du sentier épineux et du bourbier ; le pouvoir d'ascension est ainsi acquis.

 

La totalité de la force nerveuse, appelée prana par l'Hindou, se répand dans tout le corps. Elle est placée sous le contrôle du mental, en passant par le cerveau ; elle constitue la vitalité qui met en activité les organes des sens et produit chez l'homme l'expansion de la vie ; son agent de distribution est le système nerveux, par l'entremise de certains grands centres distributeurs appelés plexi ou lotus. Les ganglions nerveux, connus de la médecine orthodoxe, sont les reflets ou ombres des plexi plus vitaux. L'étudiant ne se trompera guère s'il considère que la somme du prana qu'il y a dans le corps humain constitue le corps vital ou éthérique. Ce corps éthérique est entièrement formé de courants d'énergie, et il est le substratum de la substance vivante sous-jacente à la forme physique dense.

Les "airs vitaux" est une des expressions appliquée à cette énergie. Le prana est quintuple en sa manifestation, et correspond ainsi aux cinq états du mental – le cinquième principe – et aux cinq modifications du principe pensant.
Dans le système solaire, le prana devient les cinq grands états d'énergie que nous appelons plans, les moyens d'expression de la conscience ; ce sont :

1.
Le plan atmique ou spirituel.
2.
Le plan bouddhique ou intuitif.
3.
Le plan mental.
4.
Le plan émotif, astral ou kamique.
5.
Le plan physique.

Les cinq différenciations du prana dans le corps humain sont :

1.
Prana, s'étendant du nez au cœur et étant particulièrement en relation avec la bouche et la parole, le cœur et les poumons.
2.
Samana, qui s'étend du cœur au plexus solaire ; il concerne la nourriture, et l'alimentation du corps par le truchement de la nourriture et de la boisson ; il est particulièrement relié à l'estomac.
3.
Apana est prépondérant depuis le plexus solaire jusqu'à la plante des pieds ; il concerne les organes de l'élimination, de la déjection et de la naissance, étant ainsi en relation particulière avec les organes générateurs et éliminateurs.
4.
Udana se trouve entre le nez et le sommet de la tête ; il est surtout en relation avec le cerveau, le nez et les yeux et produit, quand il est correctement dirigé, la coordination des airs vitaux et leur manipulation correcte.
5.
Vyana est le terme appliqué à la somme de l'énergie pranique telle qu'elle est répartie également à travers tout le corps. Ses instruments sont les milliers de nadis ou nerfs qui se trouvent dans le corps et il est en relation particulière et bien déterminée avec les canaux sanguins, veines et artères.
Il est dit dans ce sutra que, par la maîtrise du quatrième de ces airs vitaux, certains résultats spéciaux peuvent être obtenus et il sera intéressant de noter ce qu'ils sont. Ce pouvoir ne devient possible que lorsque le système du Raja Yoga est compris et maîtrisé, car il implique l'aptitude à fonctionner dans la tête et à diriger sa nature tout entière à partir du point se trouvant dans le cerveau. Lorsqu'un homme devient centré sur ce point, la force nerveuse, ou énergie se trouvant au sommet de la tête, entre en activité ; par la maîtrise et le contrôle corrects auxquels elle est soumise, la bonne direction des pranas du corps devient possible et l'homme atteint à la libération ; il s'ensuit par là une absence de contact avec les trois mondes. Les formules verbales employées ici sont nécessairement symboliques et il ne faut pas qu'une interprétation matérielle fasse perdre de vue leur sens véritable. La lévitation, qui est le pouvoir de marcher sur les eaux, et l'aptitude à résister à la force de la gravitation terrestre, constitue sa signification inférieure et de moindre importance. 

1.
La libération hors de l'eau est une manière symbolique d'exprimer le fait que la nature astrale est subjuguée et que les grandes eaux de l'illusion ne peuvent plus retenir l'âme émancipée. Les énergies du plexus solaire ne sont plus prédominantes.

2.
La libération hors des sentiers épineux se rapporte au sentier de la vie physique, et nul n'en a parlé avec plus de beauté que le Christ dans sa parabole du Semeur, lorsqu'il dit qu'une partie de la semence est tombée dans les chardons. L'explication qu'on en donne est la suivante : les chardons sont les soucis et les peines de la vie du monde qui, depuis si longtemps parviennent à étouffer la vie spirituelle et à voiler l'homme réel. Le sentier épineux doit mener au sentier du nord et celui-ci, à son tour, doit conduire au Sentier de l'Initiation. Dans l'un des plus anciens livres des Archives de la Loge se trouvent ces mots : "Que celui qui est en quête de la vérité échappe à la noyade et grimpe sur la berge du fleuve. Qu'il se tourne vers l'étoile du nord et se tienne debout sur la terre ferme, la face tournée vers la lumière. Que l'étoile, alors, le conduise."

3.
La libération hors du bourbier se rapporte à la nature mixte de kamamanas – le désir et le mental inférieur – qui est la cause de l'unique problème de l'humanité. C'est, là aussi, une façon symbolique d'évoquer la grande illusion qui, depuis si longtemps, prend au piège le pèlerin. Quand l'aspirant – ayant trouvé la lumière (la Shekinah) en lui-même dans le Saint des Saints – peut marcher dans la lumière, l'illusion alors se dissipe. Il sera avantageux pour l'aspirant d'établir l'analogie existant entre les trois parties du Temple de Salomon et celles du "Temple du Saint-Esprit", la forme humaine.
La cour intérieure correspond aux énergies et à leurs organes correspondants se trouvant au-dessous du diaphragme. Le Lieu saint représente les centres et organes de la partie supérieure du corps, de la gorge au diaphragme. Le Saint des Saints est la tête, où se trouve le trône de Dieu, le Siège de Miséricorde et la gloire adombrante.

Lorsque ces trois aspects de la liberté ont été réalisés et que l'homme n'est plus dominé par l'eau, le bourbier ou la vie du plan physique, le "pouvoir d'ascension" est alors acquis par lui et il peut à son gré monter aux cieux. Le Christ ou l'homme spirituel peut se tenir debout sur la montagne de l'ascension, ayant passé par les quatre crises ou points de maîtrise, de la naissance à la crucifixion. L' "udana" ou vie ascendante devient ainsi le facteur déterminant et la vie descendante ne prédomine plus.